Les mondes de GOTLIB – parce qu’il a eu plusieurs vies
Autant commencer par un aveu, je n’aime pas la bande dessinée. Je n’ai jamais réussi à aller au bout d’un seul volume de Tintin ou d’Asterix. Honte à moi. Mon frangin a bien essayer de me prendre par les sentiments en m’offrant « Le Chat du Rabbin », mais c’était peine perdue.
A vrai dire, la seule BD qui résiste encore dans note bibliothèque, c’est justement le volume n°1 de « Rubrique-à-brac » et j’entends régulièrement le rire communicatif de The Parisienne lorsqu’elle ouvre de temps à autre ce vieil album rouge usé de l’édition d’origine. Oui, on sait que c’est une édition originale parce qu’il n’y a pas écrit « n°1 » sur la couverture. Gotlib ne savait pas encore qu’il y en aurait d’autres sans doute !
Bref. Je n’aime pas la BD. Et en plus, je ne savais pas que Gotlib était juif 🙂 Pourtant, un minimum de connaissance patronymique aurait du me mettre la puce à l’oreille. Gotlib c’est juif incontestablement, malgré les deux déformations successives qu’a subi son nom. La première se fut lorsque ses parents ont émigré de Hongrie dans les années 20 et que l’agent d’état civil a retirer un « t » en écrivant Gotlieb au lieu de Gottlieb, littéralement « dieu aime ». La seconde, c’est Marcel lui-même qui va l’infliger à son nom, en supprimant cette fois le « e » pour devenir Gotlib !
Qu’importe, le sens n’a pas plus changé que la phonétique, et le destin se fiche de l’orthographe. Malgré son « t » en moins, le père de Marcel n’a pas échappé aux raffles de juifs français. Il fut transporté à Drancy, puis exécuté à Buchenwald en 1945. Le petit Marcel, qui avait encore son « e » échappe quant à lui à la déportation, sa mère l’ayant placé dans un orphelinat à Verneuil-sur-Seine.
Ce qu’il y a de bien malgré tout avec la BD, c’est que même quand vous n’en avez jamais lu, vous ne vous trouvez pas complètement démuni. Vous avez au moins entendu parler de Pilote, de l’Echo des Savanes ou de Fluide Glacial, quelquefois sans doute hésité devant une devanture de kiosque à journaux face à la couverture aguichante de ces magazines, et vous ne pouvez pas ne pas connaître certains des héros qui ont traversé leurs pages. Superdupont, Pervers pépère, Gai luron. Peut-être même Hamster Jovial ?
Gotlib a 80 ans. Il méritait bien une exposition. Avec quelques autres, dont son « maitre » Goscinny, il a révolutionné le neuvième art. Je ne pourrais vous en dire beaucoup plus sur son trait épuré, ses personnages complexes et son humour noir.
Mais une chose est certaine, le parcours réalisé par la Musée de l’Historie du Judaïsme est instructif, historique, drôle, émouvant, subversif, divers, noir et blanc, coloré parfois, attachant, vivant. Cela m’a donné envie de revoir ma position sur la bande dessinée !
En résumé, si vous aimez la BD, courrez-y (mais mon conseil est inutile, vous devez déjà l’avoir fait) et si vous n’aimez pas la BD (ou si vous croyez ne pas aimer la BD), courrez-y !
Rédacteur – C lui
12 mars 2014 – 27 juillet 2014
Musée d’art et d’histoire du Judaïsme
Hôtel de Saint-Aignan
71, rue du Temple
75003 Paris
Hôtel de Saint-Aignan
71, rue du Temple
75003 Paris
Avec un tel article, on ne peut qu’y aller 🙂
je dois l’admettre, tu n’as pas le choix 😉
Monsieur tient beaucoup à aller visiter cette exposition en ma compagnie. J’étais un peu réticente, comme toi la BD ce n’est pas trop ma tasse de thé, mais je crois qu’avec ce joli article, tu vas faire un heureux.